Comprendre le shiatsu et la formation des habitudes (Part 1)

Cet article explore un phénomène observé dans la pratique du massage shiatsu : l’arrêt prématuré du programme de soins par certains patients, malgré des améliorations notables.

 

Cet article est le fruit de mon retour d'expérience après 126 séances de massage shiatsu, de recherches sur Internet, et des échanges avec docteur Médecin émérite – Docteure de haut niveau Vũ Thị Vui – Cheffe de clinique : avec plus de 35 ans d’expérience dans le domaine de l’acupuncture et de la médecine traditionnelle vietnamienne . Il sera complété et enrichi avec d'autres éléments au fil du temps. Je remercie Joseph Lehel pour sa relecture et Docteur Thi Vui VU pour son partage de connaissances en médecine traditionnelle vietnamienne, qui a permis de corriger et d'embellir le texte.

1. Introduction

2.  Défis de l’accompagnement des personnes atteintes de maladies chroniques

3. Réflexions sur la motivation et l’accompagnement

4. Conclusion

 

Auteur : Mina Duca TRAN

Date: 20.05.2025

1. Introduction

Cet article explore un phénomène observé dans la pratique du massage shiatsu : l’arrêt prématuré du programme de soins par certains patients, malgré des améliorations notables. Trois cas illustrent ce phénomène :

A (homme, 51 ans, habitant de Binic) : après 3 séances de massage qui lui ont permis de résoudre un blocage cervical, ainsi que des douleurs à la hanche et aux jambes, il souhaite arrêter le programme. Il n’a effectué que la moitié du chemin.

J (homme, 61 ans, habitant d’Étable-sur-Mer) : après 2 séances de massage qui lui ont permis d’améliorer la qualité de son sommeil, de réduire l’intensité de ses quintes de toux et d’espacer leur fréquence, il souhaite arrêter le programme. Il n’a effectué qu’un tiers du programme proposé.

H (femme, 86 ans, habitante de Plérin) : après 6 séances de massage shiatsu pour un problème du cancer au foie, qui lui ont permis de reprendre 5 kg et de retrouver son appétit, elle souhaite arrêter le programme de massage hebdomadaire.

Ces arrêts soulèvent des questions : Quelle est l’origine de la chute de motivation chez ces personnes ? Le rythme du programme est trop intense ou pas assez pour maintenir une motivation de poursuivre ? L’encouragement ou l’accompagnement de ma part ou de la part des proches ne sont-ils pas suffisants? Ou au contraire, y a-t-il trop de soutien ? Que puis-je faire pour éviter ce phénomène ? Quels sont les facteurs principaux qui provoquent le blocage, l’arrêt de la prise en charge ainsi la chute de motivation ?

2.  Défis de l’accompagnement des personnes atteintes de maladies chroniques

Accompagner des personnes atteintes de maladies chroniques exige patience, empathie et adaptation. Le praticien doit soutenir l’autonomie tout en tenant compte des aspects émotionnels.  En tant que praticienne en massage shiatsu, je n’ai pas de contact direct avec les professionnels de santé qui suivent les personnes citées précédemment. En revanche, j’ai des échanges avec leurs proches, ce qui me permet d’obtenir plus d’informations pour le suivi après mes séances de massage.

Cas de A. : entre espoir et désillusion

A. (homme, 51 ans, habitant de Binic) souffre d’une maladie rare survenue après un AVC il y a six ans. Depuis quatre ans, il ressent une sensation de brûlure sous la plante des pieds, qui deviennent hypersensibles et extrêmement douloureux après une journée de travail. Il est également atteint d’insuffisance cardiaque.

Il dit se sentir abandonné par le système médical depuis six ans. Il vit dans une angoisse constante : peur que son cœur lâche à tout moment, peur que la douleur dans ses jambes l’empêche de se déplacer.

Malgré des résultats très encourageants après seulement trois séances de shiatsu, il souhaite interrompre l’accompagnement pour consulter un médecin, dans l’espoir de trouver une solution plus rapide et plus radicale.

Cette décision m’a profondément surprise. Elle reflète un phénomène psychologique complexe, révélant un conflit intérieur.

D’un côté, les bienfaits du shiatsu sont bien réels : il aide à renforcer la santé mentale, à réduire l’anxiété et le stress, à rééquilibrer le système digestif et à améliorer la circulation sanguine. Il faut généralement entre six et huit semaines pour que ces effets s’ancrent durablement.

De l’autre, la croyance en une solution médicale plus directe reste très présente. Il exprime aussi une grande frustration face à un système de santé qui n’a pas su poser un diagnostic clair ni proposer un traitement adapté.

Je pense ici à deux citations de Winston Churchill :

« Le seul vrai changement est celui qui vient de l’intérieur » et

« L’attitude, c’est une petite chose qui fait une grande différence. »

 

Il semble que le changement proposé par le shiatsu ne corresponde pas à ses attentes immédiates. Je dois donc accepter son choix et rester disponible s’il souhaite revenir.

 

Cas de J. : la peur du changement

 

J. (homme de 61 ans, habitant d’Étable-sur-Mer) souffre d’une toux chronique depuis plus de 25 ans. Les quintes de toux surviennent très fréquemment en situation de stress ou lors de pertes de confiance en lui. Ce symptôme perturbe régulièrement son sommeil, ce qui contribue à un état de nervosité permanent dans son quotidien.

Après deux séances, malgré des progrès encourageants, J. a exprimé le souhait d’interrompre le programme initialement prévu sur six semaines. Son épouse m’a contactée pour m’expliquer les raisons de cette décision : J. estime que les résultats obtenus ne sont pas à la hauteur de ses attentes. Il préfère rester dans son état actuel, plutôt que de poursuivre l’accompagnement.

Ce cas met en lumière un phénomène courant : la peur du changement, même positif. Le confort relatif de la situation connue peut l’emporter sur l’inconnu d’un mieux-être progressif. Il s’agit d’un mécanisme de défense face à l’incertitude.

 

Cas de H. : la fatigue du parcours

 

H., (femme de 86 ans, habitante de Plérin) atteinte d’un cancer du foie, a retrouvé l’appétit et pris du poids grâce aux séances. Pourtant, elle souhaite arrêter. À son âge, la fatigue physique et mentale peut expliquer ce choix. Il est aussi possible qu’elle ressente le besoin de reprendre le contrôle de son rythme de vie, ou qu’elle considère avoir atteint un seuil de mieux-être suffisant.

 

3. Réflexions sur la motivation et l’accompagnement

 

Les arrêts de programme observés ne sont pas des échecs du shiatsu. Ils reflètent des situations humaines complexes, influencées par plusieurs facteurs :

  • Les attentes des patients : certains espèrent des résultats rapides ou spectaculaires.
  • Le rapport au corps et à la maladie : accepter un soin progressif demande de la confiance.
  • Le rôle de l’entourage : il peut encourager ou, au contraire, exercer une pression.
  • La relation avec le praticien : la confiance, l’écoute et la communication sont essentielles.

Parfois, le shiatsu réveille des émotions ou des tensions enfouies. Cela peut provoquer une résistance, voire un rejet temporaire du soin.

En pratique, une séance par semaine suffit généralement à maintenir les effets positifs. Deux séances hebdomadaires au début du programme pourraient renforcer les résultats, mais cela reste difficile à mettre en place pour des raisons de coût ou de disponibilité.

Les retours des patients sont très positifs. Ils apprécient le suivi personnalisé, la bienveillance et la régularité de l’accompagnement. Le lien que je maintiens avec eux — avant, pendant et après les séances — les aide à rester engagés. Cela réduit les risques de décrochage, même si ceux-ci restent parfois inévitables.

Les principales causes de rupture sont souvent liées à l’état de santé général : douleurs, fatigue, troubles émotionnels. Ces blocages sont fréquents chez les personnes atteintes de maladies chroniques, qui doivent s’adapter à des changements physiques durables.

Les publications en santé arrivent à la même conclusion : accompagner ces personnes, c’est les aider à accepter ces transformations tout en les soutenant dans leur quotidien. C’est un travail exigeant, mais essentiel.

 

4. Conclusion

 

Il est important de se rappeler que le shiatsu, comme l’acupuncture, ne fait pas de miracles — surtout chez les personnes âgées atteintes de maladies chroniques. Le corps a besoin de temps pour réagir, pour intégrer ce qu’on lui propose. Rien ne se fait en un claquement de doigts.

Ce qui fait vraiment la différence, c’est l’envie d’aller mieux, l’ouverture à ce qui peut changer. C’est cette posture intérieure qui permet au soin de porter ses fruits.

Le shiatsu agit en profondeur, mais son effet dépend aussi de tout ce qui nous entoure : notre état d’esprit, nos émotions, notre environnement. Et si un accompagnement s’arrête, ce n’est pas un échec. C’est peut-être juste une pause, une étape sur le chemin.

En tant que praticienne, je suis là pour accompagner, pas pour imposer. Je propose, j’écoute, je reste disponible. Chacun avance à son rythme.

Chaque personne est unique, chaque chemin de guérison l’est aussi. Il est donc essentiel de respecter votre rythme, vos besoins, vos ressentis. La motivation ne se commande pas : elle se construit, petit à petit, avec bienveillance, patience et respect.

Je vous laisse avec une belle pensée de Maya Angelou :

« Il faut tout un village pour élever un enfant, mais il faut aussi tout un soi-même pour se construire. »

 

 

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